- Adrien a écrit:
- Cela fait quelques temps que je me pose la question... sans réponse.
Une prairie naturelle se débrouille très bien toute seule pour survivre et continuer à produire diverses herbes, fleurs .... etc
Mais quid de sa richesse, taux de MO, fertilité globale?
Si on laisse faire la prairie... l’herbe va pousser puis se dessécher en fin de saison, se coucher, se dégrader ... etc et finalement s’auto fournir-alimenter-enrichir avec son propre foin
Ou je me trompe?
VS
Une prairie (potagère du coup) nourrie au foin et autre enrichissements tontes de pelouse, vrai BRF...
Celle-là on sait qu’elle s’enrichit au fil du temps, du coup de manière «artificielle» grâce à l’action de l’homme
Les deux peuvent-ils être comparés... ou pas?
Il y a une "fertilité" naturelle, en tout lieu. Des minéraux qui se dissolvent. Les fabacées qui captent l'azote de l'air... Les mécanismes biologiques font "tourner" ça.
Cette fertilité naturelle, ne rêvons pas, est faible : elle correspond peu ou prou à ce que produisait nos meilleures terres avant l'arrivée des engrais (naturels ou de synthèse) : 7 à 8 quintaux de blé, dans les terroirs riches !
Elle est parfois d'une pauvreté affligeante : landes, "champagnes" (chercher des photos historiques de la "champagne pouilleuse" - non cultivée, on y faisait passer quelques moutons, des collectionneurs / convertisseurs d'une biomasse pas mangeable sinon ; noter au passage que le véganisme n'a aucune chance dans les contrées pauvres : ni chez les touaregs, ni chez les Masaïs, ni chez les Eskimos, ni, chez nous, dans les Landes (avant), ou en Champagne pouilleuse (avant) - tous ces peuples ont besoin d'animaux collectionneurs / convertisseurs de biomasse !!!)
Sur la ferme d'antan, tout cela était recyclé. Y compris, fèces, urines, fumier, déjections humaines. Prélevé comme biomasse nutritive, cela retournait dans les champs, les cycles étaient bouclés. Au niveau très faible que j'évoquais. Parfois misérable dans les terroirs de misère !
Mais attention, une prairie naturelle n'est prairie, sauf dans les alpages, que parce qu'elles sont pâturées et fauchées ! Sinon, immanquablement, sous nos latitudes, cela devient friche, puis forêt. C'est pour ça que "naturel" est un qualificatif désastreux (conceptuellement parlant).
Donc la prairie est un élément d'un SYSTEME. D'une forme d'exploitation agricole des terroirs. Sans cela, ce serait une forêt.
Sa richesse "minérale" est généralement faible - même si en fait de telle ou telle roche dans le socle, tel élément peut être abondant : calcium sur calcaires, potassium sur tel ou tel sol riche en feldspath ou micas, etc...
En revanche, au fil des siècles, des dizaines de siècles plutôt, sa teneur en MO tend vers un équilibre : les "restes" de matières organiques (non broutées, non fauchées) se transforment en "MO stables" (souvent appelées "humus"), tandis qu'une petite partie de ces MO stables est minéralisée chaque année (assez peu, le sol n'étant pas travaillé : 1 à 1,5 %). Sur le très très long terme, sous nos climats, cet équilibre entre "entrées de MO stables" dans le sol, et sorties de MO stables tend vers 3 à 4 % de MO stables. En gros, deux fois plus que les terres labourées, qui "oxydent" beaucoup plus vite leurs MO stables (il y a plus d'air !). Et qui tendent vers 1,5 à 2 % (cela dépend beaucoup des restitutions qui sont faites).
Bref, non : une prairie tend vers SON équilibre ! Sinon, l'homme trouverait des gisements de fertilité partout où il y a des prairies permanentes. Ce n'est pas le cas !
Progressivement, les prairies permanentes aussi ont été fertilisées. Du moins celles proches de l'habitation : on y épandait des purins, parfois des lisiers... Et puis, après-guerre, des engrais...
Donc là, la fertilité minérale a considérablement augmenté. Et on a aujourd'hui des prairies permanentes qui peuvent être riches !
En revanche, les prairies, déjà assez riches, ne recevaient pas les MO, dans les systèmes associant élevage et cultures (ce qui était le cas de quasiment tous les systèmes agraires - hormis "l'élevage de cueillette" = pastoralisme). Donc elles n'étaient pas plus riches en MO stables...
Enfin, nos "prairies avec du foin" ne sont pas des prairies !!! Ce sont des potagers enherbés ! Bien sûr, enrichis, en minéraux ET en MO, par nos apports. Apports qui ne sont rien d'autres que des "transferts horizontaux" de fertilité : je pique là (prairie permanente) pour mettre ici (potager). Potager qui s'enrichit. Qui parfois voit parfois sa fertilité "exploser" !